04/04/2017
Les Malins Plaisirs de Patrice Mincke
Diplômé du Conservatoire royal de Bruxelles en 1994 et lauréat du Prix Jacques Huisman en 2011, Patrice Mincke met en scène dans toutes les institutions de notre communauté depuis quelques saisons. Après « Race » de David Mamet (2013) et « Le Malade imaginaire » de Molière (2016), il nous revient cette année avec le spectacle « Tu te souviendras de moi » de François Archambault. Découvrons ensemble ses Malins Plaisirs :
Un livre
Je lis peu de romans, mes lectures sont partagées entre des pièces de théâtre (ben tiens !) et La Recherche, une revue scientifique à laquelle je suis abonné et qui me passionne. Par ailleurs, ces dernières années, les romans que j’ai lus étaient principalement des traductions, dont le niveau de langage est rarement exceptionnel. Puis, récemment, j'ai lu « Dans la main du Diable » de Anne-Marie Garat… cette auteure manie si bien la langue, elle choisit ses mots avec une telle précision, ses images sont tellement finement exprimées, que je me suis rendu compte que je n’avais plus profité de la beauté de notre langue depuis bien longtemps. Les meilleurs auteurs de théâtre ont rarement pour but de se lancer dans des descriptions avec des mots rares et des tournures travaillées : les formes sont plus brutes, les mots sortent du cœur plus que du cerveau (et mènent donc à un autre plaisir de la langue). Même Racine ou Corneille, dont les vers sont souvent magnifiques, s’expriment avec un vocabulaire extrêmement restreint. Avec Anne-Marie Garat, j’ai redécouvert le plaisir – typiquement francophone je pense – de m’extasier sur une tournure ou sur le choix d’un mot. Un régal.
Une musique
J’ai récemment été au concert de Saule ; c’est un artiste que j’aime beaucoup car je trouve sa démarche honnête et sincère. En effet, il ne semble pas chercher le succès à tout prix mais au contraire écrire avec son cœur, en suivant ses intuitions et ses valeurs. Chez les comédiens comme chez les chanteurs, j’adore la simplicité ! Et puis en scène il a un tel don de sympathie, une telle façon d’être simplement là, d’assumer ses défauts, de ne pas se prendre au sérieux, que toute la salle a la banane en le regardant.
Une destination
J’ai récemment passé quelques jours à Barcelone, où je n’avais plus mis les pieds depuis 1996. J’avais visité la Sagrada Familia à l’époque, et n’en avais gardé qu’un souvenir mitigé : seule la façade de la nativité était réellement accessible, l’intérieur de la cathédrale étant en plein chantier. 20 ans plus tard, j’ai pu entrer dans la cathédrale… et j’en ai été complètement bouleversé. Les couleurs des vitraux, l’agencement des espaces, l’élancement des colonnes, les textures de chaque matériau, tout cela est d’une telle harmonie et d’une telle élévation que j’en ai été profondément ému. C’était un vrai choc. Un architecte de génie a passé sa vie à imaginer et organiser mille détails qui, une fois réunis, forment un ensemble cohérent au service d’une incroyable émotion. En 2026 la Sagrada devrait être achevée… je compte bien y retourner !
Quel Malin Plaisir prends-tu à aborder les textes que tu mets en scène ?
Ah, vaste question ! Je pourrais parler des heures du plaisir que je prends à mettre en scène ! Pour résumer la question, je crois que mon plaisir tient essentiellement dans le rapport humain : celui qui me lie à l’auteur au moment de la lecture (lorsqu’il s’agit de comprendre l’univers qu’il convoque par ses mots), celui, très intense, qui me lie ensuite aux comédiens quand je les guide dans le jeu, celui enfin qui lie toute l’équipe du spectacle aux spectateurs lors de la représentation. C’est comme si l’émotion que l’auteur a ressentie au moment de prendre la plume était contagieuse et nous gagnait tous, un à un ; ses révoltes, ses coups de blues ou ses fous rires deviennent les nôtres – ou plutôt réveillent nos propres émotions, sans que chacun ne perde pour autant son individualité et sa capacité de jugement. Pour permettre cette « contagion », je prends un malin plaisir à décortiquer tous les rapports humains qui lient ou opposent les personnages de la pièce. J’aime les analyser puis reproduire tout ce qui en fait la complexité et la richesse. C’est un travail minutieux, analytique, et pourtant très en contact avec mes propres émotions. Mon cerveau et mon cœur qui se rencontrent. Un vrai plaisir, intense et durable ! …
SON ACTUALITÉ
« Tu te souviendras de moi » de François Archambault, du 21/03/17 au 29/04/17.
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